Ivan Dubé
La densité de la neige (ou le rapport neige/eau liquide) est un
paramètre auquel relativement peu d'importance a été accordée au niveau de
la météorologie opérationnelle. L'application automatique d'un facteur de
conversion « 10 :1 » (autant par les prévisionnistes du SMC que dans
l'interface SCRIBE) pour passer du QPF (en mm) à une accumulation de neige
(en cm) en constitue une preuve flagrante. Pourtant, la densité de la
neige est bel et bien un paramètre essentiel dans plusieurs champs
d'activités. On n'a qu'à penser aux impacts de la densité sur le
déneigement, le transport, la construction, les avalanches et l'hydrologie
(prévisions de crues, gestion des réservoirs, érosion, etc.). Les besoins
en termes de prévisions météorologiques spécialisées sont grandissants
dans ces domaines, où les impacts socio-économiques sont importants. Il
nous faut donc reconnaître dès maintenant la nécessité de développer des
méthodes fiables et efficaces afin que l'on puisse diagnostiquer et
prévoir la densité de la neige dans un avenir rapproché.
Les principaux objectifs de cette étude consistent à sensibiliser les
météorologistes à cette problématique ainsi qu'à leur fournir des outils
opérationnels de diagnostic/pronostic appropriés et efficaces.
Pour ce faire, une étude climatologique des rapports neige/eau
liquide basée sur près de 500 chutes de neige réparties sur 8 sites
d'observations couvrant une bonne partie du territoire québécois a été
effectuée. Puis, l'ensemble des informations théoriques associées à la
densité de la neige ont été recueillies, incluant la microphysique des
nuages et des précipitations, afin d'identifier les processus physiques
qui déterminent la densité. Les principaux sont : la forme et la dimension
des cristaux, l'accrétion, l'agrégation, la fragmentation et les
changements de phase (fonte/sublimation/congélation). Ces processus
dépendent fortement de divers paramètres météorologiques tels que les
profils de température et d'humidité ainsi que les vents et le mouvement
vertical. De plus, les impacts respectifs de ces processus sur la densité
de la neige dépendent fortement du type de cristaux de neige (étoiles,
plaquettes, colonnes, aiguilles, etc.).
Les résultats de l'étude climatologique ont ensuite été interprétés
en fonction de la théorie. D'autres études climatologiques ont aussi été
examinées pour fins de validation. Il en résulte une très bonne
concordance entre la théorie et la climatologie, ce qui nous confirme leur
utilité dans le développement de nouveaux outils de prévision de la
densité.
Après énumération des conditions favorables et défavorables aux
densités faibles/élevées, diverses techniques de diagnostic/pronostic
existantes ont été évaluées et de nouveaux outils sont proposés. Un
algorithme de prévision incorporant tous les paramètres et phénomènes en
cause et tenant compte de leurs impacts respectifs selon le type
cristallin a été développé. Cet algorithme permet de diagnostiquer la
neige en 5 catégories (très lourde, lourde, ordinaire, légère et très
légère), auxquelles on associe un rapport neige/eau (ou facteur de
conversion) moyen (4, 7, 10, 15, 20 respectivement).
Puis, un lien est établi entre la densité de la neige et la
probabilité d'observer de la poudrerie généralisée. Cela a pu être
démontré à l'aide de plusieurs cas. Suivent une série de recommandations
ayant pour but l'amélioration de nos prévisions d'accumulation de neige,
de poudrerie et à caractère hydrologique.
Finalement, le futur de ce projet est discuté : vérification,
utilisation opérationnelle et automatisation de l'algorithme, intégration
d^Òun champ de densité dans les modèles numériques et dans SCRIBE, étude
détaillée sur la poudrerie, adaptation de nos prévisions spécialisées et
création de nouveaux produits.
--------------------------------------------------------------------------------
STUDY ON SNOW/LIQUID RATIOS OVER QUÉBEC
Snowfall density (or the snow/liquid ratio) is a parameter which has
been somewhat neglected by the meteorological community. The systematic
use of the «10 to 1» rule (by MSC forecasters as well as within the SCRIBE
interface) to convert the QPF (in mm) into snow accumulations (in cm) is a
good proof of that fact. However, snow density is important or even
essential in many sectors or applications (e.g.: snow removal,
transportation, construction, avalanche & hydrological forecasting, ...).
The need for specialized precipitation forecasts is increasing so we
should recognize the necessity to develop efficient ways of forecasting
snowfall density in the near future.
The main objectives of this study were to develop awareness of this
problem among forecasters and also prepare them (through training and by
providing new and adequate forecast tools) to face existing and upcoming
challenges with respect to precipitation forecasting.
To do so, a climatological study of snow/liquid ratios based on near
500 events over 8 observing sites has been performed. Then, all the
theoritical information available on the subject (including cloud and
precipitation microphysics) was used to identify the various physical
processes which determine snow density : ice-crystal growth (shape and
size), accretion, aggregation, fragmentation and change of phase (melting,
sublimation, freezing). These processes are strongly dependent on several
meteorological parameters such as : temperature profile, relative humidity
profile, vertical motion, low-level winds and ground temperature. They
also depend on the crystal type (dendrites, plates, columns, needles
etc.).
Existing diagnosis/forecast techniques were evaluated and found
incomplete and inadequate. Several new tools have been proposed, leading
to the development of a snow/liquid ratio forecast algorithm. This
algorithm includes all processes and parameters involved and considers
their specific impact with respect to each crystal type. It gives us the
ability to diagnose snowfalls among 5 snow categories (very heavy, heavy,
average, light, very light), to which are associated a mean snow/liquid
ratio, or conversion factor (4, 7, 10, 15, 20).
Beyond snow accumulations, other aspects of weather forecasting related
to snow density were studied. For example, it was found that the potential
for severe blowing snow events increases significantly after low-density
snowfalls (high snow/liquid ratios). Some « rules of thumb » involving the
blowing snow occurrence as a function of wind speed and snow density were
developed. Suggestions were also made in order to improve snow
accumulation, hydrological and blowing snow forecasts.
Future developments include: verification, operational use and
automation of the forecast algorithm, completion of the climatology
(northern Québec and the rest of Canada ?), follow-up on blowing snow
(including wind direction and site-specific statistical information),
integration of snow density (and therefore adequate water equivalent-snow
conversion) into numerical models and finally, adaptation of existing
specialized forecasts and creation of new ones.
Results from our climatological study and several others were then
analysed and compared with theory. A good agreement was found between
theory and observations, which confirms their usefulness in the
development of new forecast tools.